CORPS-ACCORD D’UN ÊTRE SYMBIOTIQUE

phyto-sapiens-nathalia-de-saint-oyant

La plante incarne le lien le plus étroit et le plus élémentaire que la vie puisse établir avec le monde. L’inverse est aussi vrai : elle est l’observatoire le plus pur pour contempler le monde dans sa totalité. Sous le soleil ou les nuages, en se mêlant à l’eau et au vent, leur vie est une interminable contemplation cosmique (…) »

Emanuele Coccia, « La vie des plantes, une métaphysique du mélange»

Je cherche

des parfums nouveaux

des fleurs plus larges

des plaisirs

inéprouvés

Gustave Flaubert, « La tentation de Saint-Antoine » 1874

Je cherche

des parfums

nouveaux

des fleurs

plus larges

des plaisirs

inéprouvés

Gustave Flaubert  La tentation de Saint-Antoine, 1874

« Notre monde est un fait végétal avant d’être un fait animal »

Emanuele Coccia, «la vie des plantes, une métaphysique du mélange»

Le projet « Phyto-Sapiens » explore les possibilités d’envisager un nouvel être vivant, essentiellement féminin, dont le corps humain végétalisé serait une hybridation sensorielle et organique qui adopterait progressivement les attributs et les comportements du végétal tout en restant fidèle à sa nature humaine et féminine.

Il pourrait ainsi pousser plutôt que grandir, photosynthétiser ses émotions, s’ouvrir et se refermer au rythme des saisons ou encore émettre des odeurs et des parfums en guise de langage. Il deviendrait cet espace de pollinisation onirique favorisant l’échange, la transmission et la fertilité. Sa peau, véritable éco-système vivant, deviendrait une écorce sensible, ses cheveux des tiges ou des pétales mouvants, ses poumons des feuilles respirantes.

Cet être symbiotique, à la frontière du monde humain et végétal vivrait au ralenti, absorbant son environnement, réagissant à la lumière, au vent, à l’eau, scellé au sol par ses racines nourricières, dans une autre perception du temps et de l’espace.

Dans ce premier OPUS du projet, j’explore le corps et j’imagine les accords d’odeurs insolites et fantasques qu’ils pourraient exhaler.

Ces accords ne sont absolument pas imaginables ni réalisables en parfumerie.

Ils ont pour unique vocation de susciter chez le spectateur des impressions et illusions olfactives fortes et lui donner la possibilité de se projeter dans des récits olfactifs imaginaires où le sens de l’odorat prend toute sa dimension, là où dans des situations du quotidien, il est si peu perçu.

Le corps, charnel, intime, écrin si personnel à chacun, convoque tous les imaginaires : Danse, magie, mouvement, symbole, icône, totem, sanctuaire, sensualité, désir, extase, palimpseste, métamorphose, labyrinthe, aussi bien que dégoût, tabou, vieillesse, prison, malformation, cicatrice, décomposition, carcasse, puanteur…

Il renvoie à tous les SENS, à toutes les émotions :

Il se veut tout aussi doux que rugueux, moite que sec, froid, chaud, gras, flasque, cadavérique,…peau de pêche, ou chair de poule.

Il se colore, se pâlit, se plisse, se cambre, s’assouplie, frissonne, vibre, picote, palpite, brûle, se pulpe, se tend, se relâche, se pâme sous l’influence d’émotions fortes.

Le corps est une infinité d’équations, un lieu d’expression, d’histoire et de mémoire.

Mais surtout, le corps exhale une infinité d’odeurs aussi suaves que repoussantes.

C’est en présence de certaines personnes qui exhalaient une odeur particulièrement évocatrice que ce projet a germé en moi.

∗ G. et B. avaient jusque dans les plus petits pores de leur peau, cette fragrance si spéciale d’ambre gris

∗ A. sentait le papier maché humide, une odeur mate, un peu boisé

∗ J. exhalait une envoutante odeur de purée au fromage fondue à la racine de ses poils pubiens

∗ M. avait ce sillage de beurre de karité âpre, un peu fleuri

∗ T. révélait sous ses bras un bouquet de poivre laiteux et légèrement épicé

//cØrps//

Enveloppe

charnelle

membrane

surface poreuse

et de contact

barrière intime

frontière

tunique

carapace

véhicule

⇒INCARNATION

  transitoire

  mortelle

Ōsmaphorion

Du grec osmé, « odeur » et phorion, « ce qui porte ou contient ».

Néologisme poétique 

Désigne un objet-corps qui produit des exhalaisons continuelles et volatiles, plus ou moins abondantes, plus ou moins odorantes, à la surface de la peau. Phénomène directement proportionnel au quantité d’émotions qui le traverse.

 


→ CØRPS

⌈substance⌋ se présentant à la perception comme un sujet (substrat) matériel qui oppose la résistance de sa forme, de ses propriétés (configuration spatiale, impénétrabilité, masse) et de son odeur∗ aux modifications que lui imposent les rencontres avec lui-même et avec les autres corps.

> Dans ce projet

J’ai pensé le corps comme

Un osmaphorion*

objet olfactif

parfaitement imaginaire

qui se déclinerait

au rythme d’accords d’odeurs

secrétées tout au long de la journée,

selon les situations et les émotions

qui le traversent

 

Āccord =

du latin médiéval « Accordare » signifie littéralement « unir les cœurs » ou « mettre en harmonie » (ad cor dare, « donner au cœur »

1)• Union, association de plusieurs odeurs senties à la fois et formant harmonie / Accord parfait / Accords consonants, dissonants.

2)• « Harmonie de notes offrant de nouvelles sensations olfactives grâce à la combinaison de quelques unes à plusieurs centaines de matières premières odorantes ». (Elysabeth de feydeau, dictionnaire amoureux du parfum)

Corps-accord // OSMAPHORION *

Maquettes préparatoires